Septembre 2014

“Maman, je crois que j’ai oublié quelque chose”  Eustache, 15 ans

Nous sommes au beau milieu de notre périple de 800km en route pour l’école : une mère épuisée, quatre ados surexcités, deux chiens au poil transpirant et de nombreuses valises remplies à la hâte, empilées dans le coffre d’une voiture couverte de poussière. On est loin de notre première année en boarding school, où tout avait été méticuleusement préparé, chaque article du trousseau étiqueté, les vêtements soigneusement pliés des semaines à l’avance.

Cinq années plus tard, les choses ont donc changé : je partage la conduite avec mes deux aînés qui ont passé leur permis à la boarding school, profitant de mon temps libre pour accomplir ma liste de « to-do’s » et chercher dans mon sac plein d’objets inutiles une aiguille et du fil. L’un de mes fils tente d’écrire ses lettres de remerciement, la reprise du stylo s’avérant après deux mois de vacances un exercice difficile. L’autre observe le paysage qui défile à la fenêtre comme on regarde les bateaux passer à l’horizon. Le morceau des Pink Floyds « we don’t need no education » passe en boucle sur le haut-parleur de la voiture …

Back to school dog

La douceur de l’été s’éloigne avec les kilomètres; c’est maintenant l’heure de faire son nœud de cravate pour la rentrée. Il a fallu se précipiter au pressing pour faire nettoyer les costumes froissés et cirer les chaussures qui avaient perdu leur couleur. Les peignes oubliés sont ressortis des tiroirs et la session de courses in extremis a révèlé que les enfants ont grandi de 5 cm durant l’été. Un nombre incalculable de vêtements porte le nom d’autres familles ; mon époux porte des chaussettes appartenant à « Johnnie H. Travers ». Toutes les chaussettes Bédier ont simplement disparues.

Un épais volume de “Guerre et Paix” est coincé sous le siège; il a passé là tout l’été. Mes efforts pour élever les enfants sur le plan culturel ont échoué ; je serais surprise si l’un d’entre eux s’avérait capable d’écrire même son propre nom.

Les enfants arriveront de tous les coins du monde pour commencer cette nouvelle année en boarding school. Pour beaucoup, le voyage de retour dure plus longtemps que pour nous, malgré les progrès des moyens de transport. Une amie me décrivait ses voyages, alors qu’elle avait 12 ans dans les années 70, de chez elle au Maroc vers la boarding school sur l’île de Wight. Elle devait prendre un avion, puis passer une nuit à Londres, puis un train, puis un ferry, puis encore un train, enfin un taxi. Ensuite, elle ne voyait pas ses parents pendant des mois.

Je ne dirais pas que mes enfants brûlent de retourner à l’école; peu d’ados choisiraient d’avoir à se lever à 7h30 le matin au lieu de midi et demi, ou de réviser ses verbes irréguliers allemands au lieu de feuilleter un magazine, avachi sur un canapé ou un hamac, ou sur la plage ou sur un bateau ou autre endroit de villégiature. Ils ne semblent néanmoins pas refuser ce qui les attend.

Back to school

Une nouvelle année en boarding school n’apportera pas que du travail et du devoir d’obéissance ; elle donnera aussi aux élèves l’opportunité de continuer à construire sur leurs succès passés ou d’avoir une seconde chance sur les matières qu’ils ne dominent pas encore. Aussi la chance de se lancer dans de nouveaux projets. Mais avant tout, de retrouver les amis. Même si Facebook a tourné à plein pendant l’été, rien – et je suis fière de le dire – ne remplace les retrouvailles physiques.

Au moment où je rejoins mon bureau en France quelques jours après, j’ai déjà reçu de nombreux et heureux messages d’Angleterre. Enfin en chambre seule, accepté dans la Cheese & Wine Society, pris dans l’équipe 1 de squash. Les préparatifs de la course de radeaux et la collecte de fonds caritatifs sont déjà lancés ; une année active à l’école vient de démarrer une nouvelle fois. Et l’un de mes fils pense à rajouter : “de toute façon, on nous a déjà donné tellement de boulot”, alors je suis rassurée.

BONNE RENTREE!

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